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Photo du rédacteurAlain Reynaud

LA BIODIVERSITÉ, C'EST MON DOMAINE !


La biodiversité c'est mon domaine !
La biodiversité c'est mon domaine !

Domaine de Campaucels

Réconcilier vigne et élevage, atouts de biodiversité !


Cathy Do, du domaine de Campaucels à Montagnac dans l’Hérault, est très impliquée dans la préservation et l’enrichissement de la biodiversité. Convaincue de la nécessité de recréer du lien entre cultures et élevage, elle fait part entre autres de son expérience avec les brebis et les chèvres. Présentation de cette lauréate, médaillée d’argent en 2024 au concours « La biodiversité c’est mon domaine », organisé par Vitisbio et Millésime Bio.


Le domaine de Campaucels à Montagnac dans l’Hérault, engagé pour la biodiversité. (© Alain reynaud)


Vitisbio : Pouvez-vous nous présenter le domaine et comment les animaux sont présents sur vos parcelles ?


Cathy Do : Je suis installée avec mon neveu Clément. Tous deux nous gérons le domaine de Campaucels, de 44 hectares dont 21 ha de vignes en IGP Oc et AOP Languedoc, Grès de Montpellier et Picpoul de Pinet. Nous sommes en partenariat avec un voisin berger. À partir de fin janvier, ce dernier fait pâturer son troupeau de 140 brebis et 50 chèvres sur nos parcelles. Nous lui mettons à disposition nos vignes, mais aussi 11 ha de champs de sainfoin et méteil que nous semons pour son troupeau. Les brebis et les chèvres mettent bas à cette période et les petits se nourrissent sur nos terres. Les chèvres ne grignotent pas trop les bois, c’est acceptable ! Les animaux quittent les vignes au plus tard mi-mars. Ils peuvent rester dans les champs jusqu’à mi-avril. Le berger gère l’alternance entre leur présence dans les vignes et dans les champs. La nuit, comme les brebis ont tendance à rester sur place, et donc à plus tasser les sols, le berger les parque plutôt dans les champs. En général elles arrivent à passer sur l’ensemble des vignes, sauf cette année. Elles sont arrivées trop tard, et cinq hectares n’ont pas été pâturés. Ce sont les aléas des partenariats !


Cathy Do et son neveu Clément. (© Alain Reynaud)


Vous faites le choix de semer les couverts dans les vignes pour les brebis ?


Oui, je sème un rang sur deux avec de l’orge, de l’avoine, de la vesse, gesse, colza et féverole. L’inter-rang non semé est griffé une fois. Je considère que je n’ai pas une flore assez intéressante en enherbement spontané. Mon objectif est de pouvoir avoir, les années où cela est possible, un mulch d’herbes mortes sur les sols en juillet. Si je laisse l’enherbement spontané, je n’ai plus rien sur le sol en été. Avec les semis, et si le berger gère bien son troupeau et ne laisse pas les animaux tondre l’herbe à ras, je peux avoir quand même un beau couvert qui repousse, avec une belle mise à graine. Cela a été le cas en 2024. Après deux passages de rouleau faca, nous avons eu un bon mulch recouvrant la terre. L’année était aussi propice, car nous avons eu 300 mm de pluie entre mars et mai. Les années très sèches, nous détruisons le couvert mi-avril. Nous n’avons pas encore l’irrigation dans les vignes.


Cathy Do mise sur le partenariat avec un berger pour l’entretien de ses parcelles. (© Alain Reynaud)


Vous trouvez aussi dans ce partenariat avec l’éleveur un intérêt pour la protection sanitaire des vignes ?


En effet, le berger trait son troupeau de chèvre et m’apporte ainsi en saison, un bidon de petit-lait par semaine environ. J’incorpore ainsi pour chaque traitement cuivre et soufre, un peu de petit-lait, à raison de 10 litres pour 500 litres. Il ne faut pas en mettre beaucoup, sinon cela peut avoir tendance à cailler. Cela m’aide à diminuer les doses de cuivre et de soufre. J’utilise en général uniquement 25 % de la dose préconisée. Je peux ajouter aussi des extraits fermentés d’ortie et de consoude. Je n’ai pas fait d’expérimentations pour prouver que j’ai de meilleurs résultats en utilisant ces compléments. Mais j’observe que les vignes sont peu malades, et que mes charges en phytos diminuent. En 2024, à part sur merlot, où j’ai 30 % de pertes, je n’ai pas eu trop d’impacts, et j’ai utilisé environ 1,2 kg de cuivre par hectare.


Les brebis pâturant en janvier sur les parcelles du domaine. (© Alain Reynaud)


Pourquoi avez-vous choisi de faire venir des animaux sur le domaine ?

On me dit souvent que je travaille gratuitement pour le berger, en semant des champs et les inter-rangs des vignes pour ses animaux ! Mais s’il gère bien son troupeau, et qu’il ne me laisse pas le sol raclé, j’en tire des bénéfices. Je suis convaincue que l’on ne peut pas faire de la viticulture, et des cultures en général sans élevage. C’est une alliance bénéfique ! Les animaux apportent leurs micro-organismes qui enrichissent le système. Nous en avons besoin ! Et je le vois aussi dans les champs. Même si les animaux passent dessus, j’ai quand même des épiaisons. Le conservatoire des espaces naturels, avec qui je suis en lien, m’a suggéré d’enfouir légèrement les résidus et attendre que cela repousse. J’ai en effet un bon stock de graines et cette année, je n’ai pas ressemé les champs.


Un apiculteur installe aussi des ruches près des parcelles de sainfoin. (© Alain Reynaud)


Quelles sont vos autres pratiques en faveur de la biodiversité ?

En plus des haies que nous avons déjà, nous avons planté plus de 500 mètres de haies, qui en outre, plantées au nord et à l’ouest des parcelles, aident à briser le vent et atténuer le soleil de fin de journée. Nous allons continuer dans cette lancée dans les prochaines années, et ce pour assurer un maillage parfait de notre territoire. Le domaine se trouve aussi en zone Natura 2000, créé en 2006. Dans ce cadre nous sommes engagés dans des MAEC sur certains mètres linéaires à intérêt faunistique, où nous devons entretenir de façon douce les arbres existants, pour préserver les habitats. Nous sommes aussi en lien avec la LPO, dans le cadre de leur programme « des terres et des ailes ». Grâce à cela sont réalisés des inventaires de faune et flore, des sensibilisations, des poses de nichoirs. Ce que je retiens de tous ces accompagnements, c’est la diffusion des informations et la sensibilisation. C’est cela qui fait changer notre regard et nos pratiques. Par exemple, avant je détestais les ronciers et je cherchais à les raser. Maintenant j’ai appris que c’est un excellent habitat pour les oiseaux, comme la pie-grièche à tête rousse, et qu’il suffit de savoir le maîtriser. Et globalement, je ressens mes vignes plus résilientes au fil des années, notamment vis-à-vis des maladies.


Propos recueillis par Frédérique Rose



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